Le Repaire du Petit Ver

Trois enterrements (The Three Burials of Melquiades Estrada) de Tommy Lee Jones

Premier film cinéma de l'acteur Tommy Lee Jones, Trois enterrements a récolté plusieurs récompenses au dernier festival de Cannes (prix du scénario et prix d'interprétation masculine) et était précédé d'une réputation plutôt flatteuse...

Pete Perkins est contremaître dans un ranch texan proche de la frontière. Il offre du travail à un clandestin du nom de Melquiades Estrada et se lie peu à peu d'amitié avec lui. Le jour où le corps de Melquiades est retrouvé abandonné aux coyotes dans le désert et devant la passivité des forces de l'ordre locales, Pete se met en tête de retrouver son assassin et d'offrir une sépulture décente à son ami...

Pour un coup d'essai, Tommy Lee Jones signe un coup de maître. Il se dégage de son film une impression de monde finissant, d'un univers qui a perdu ses valeurs et dont Pete Perkins serait le dernier garant. En cela, Trois enterrements se rapproche du cinéma d'un Clint Eastwood ou d'un Sean Penn, un cinéma dans lequel les personnages doivent souvent composer avec la perte d'un être cher. Comme chez Eastwood et Penn, le voyage de Pete Perkins et de l'assassin est avant tout spirituel avant d'être physique : il donne l'occasion à Pete de couper les ponts avec un univers dans lequel il se sent de plus en plus étranger tandis que l'assassin se redécouvre une humanité que tout le monde pensait perdue à jamais (sa femme dit d'ailleurs de lui que "ce connard est au-delà de toute rédemption") Pourtant, c'est bien de rédemption qu'il s'agit là quand cet homme prend conscience de la portée véritable de son geste...

Une belle histoire donc remarquablement servie par des acteurs extraordinaires. Tommy Lee Jones mérite amplement son prix d'interprétation masculine dans un rôle tout en retenue et en finesse. On n'est jamais mieux servi que par soi-même... Quant à Barry Pepper, il rend par son jeu profond son personnage beaucoup plus complexe qu'il ne le semblait au premier abord : contrairement à l'assassin de Lady Vengeance qui était introduit un peu de la même manière, l'assassin de Trois enterrements révèle une humanité qui avait été enfouie sous d'épaisses couches de cynisme mais qui est toujours présente quelque part. D'ailleurs, Trois enterrements est un film superbement optimiste quant à la nature humaine (même le pire des salopards est humain en définitive) aux antipodes de l'optimisme naïf et illogique de certains réalisateurs (Steven Spielberg pour ne pas le citer...)

En tout cas, pour une fois, voilà un film qui n'a pas volé ses récompenses. Remarquablement écrit et interprété, Trois enterrements est un film magnifique et bouleversant dont la fin prendra de nombreuses personnes à contre pied (superbe réplique finale au passage...)

Ecrit par PetitVer, le Dimanche 11 Décembre 2005, 17:54 dans la rubrique "Cinéma & DVDs".